Quelle est la pertinence du Hombu Dojo dans la pratique actuelle de l'Aïkido et pourquoi y aller ?

Quelle est la pertinence du Hombu Dojo dans la pratique actuelle de l'Aïkido et pourquoi y aller ?

Un demi-siècle après la mort de son fondateur O Senseï Ueshiba Moriheï, l'Aïkido a pris une ampleur que le patriarche aurait eu du mal à imaginer, non seulement en termes de nombre de pratiquants et de pays dans lesquels l'Aïkido a pris pied, mais aussi en termes de l'influence que le message intrinsèque de cet art martial venu du Japon a eu sur l'inconscient collectif mondial. Pourtant, et c'est inévitable, le nombre d'élèves directs de O Senseï se réduit de jour en jour. À l'inverse, de nombreux experts non japonais ont une ancienneté équivalente à celle de beaucoup de maîtres Japonais. Certains d'entre eux se sont formés au Hombu Dojo[1][2], alors que d'autres n'ont jamais foulé un tatami japonais.

Le fondateur lui-même ayant pensé l'Aïkido comme un système de techniques et de valeurs qui pouvait s'exporter et se développer hors du contexte socioculturel japonais,[3] on peut donc se demander quelle est la place du Hombu Dojo aujourd'hui, et si le centre de gravité de l'Aïkido mondial n'est pas en train de se déplacer vers l'occident. Dans cet article je propose de vous faire partager mon expérience au Hombu Dojo, de définir ce que cela peut apporter à un pratiquant étranger, et de vous donner des pistes sur ce que peuvent être vos attentes et ce que seront vos devoirs en tant que visiteur si vous décidez d'aller là-bas. Mon but est clair : j'espère vous donner l'envie de franchir le pas et venir pratiquer au Japon ! Notez que tout au long de cet article, je ferai la distinction entre la fondation Aïkikaï et les opérations au Hombu Dojo. Je suis un élève du Hombu Dojo et bien que celui-ci serve de quartier général à la fondation Aïkikaï, mon opinion se portera uniquement sur ce qui se passe sur le tatami, pas sur l'organisation, et encore moins sur ses branches affiliées.

Avant d'arriver au Hombu Dojo, j'en avais comme tout le monde beaucoup entendu parler via des films et des articles. J'ai également eu la chance d'étudier avec plusieurs professeurs ayant passé plusieurs années à s'entraîner là-bas, certains comme Alan Ruddock[4] et Henry Kono[5] l'ayant fait du vivant de O Senseï. Pour être honnête, aucun des élèves directs de O Senseï que j'ai côtoyés ne m'a particulièrement encouragé à faire le déplacement, au contraire. Ils considéraient que la magie d'O Senseï s'était éteinte avec lui. Du côté des gens ayant étudié au Hombu Dojo avec la génération suivante d'enseignants, les avis étaient là aussi mitigés. Certains considéraient, à l'image de leurs aînés, que puisque les maîtres Osawa (père), Arikawa, Yamaguchi, etc. n'étaient plus là, il n'y avait plus d'intérêt à venir pratiquer au Hombu Dojo. Ils considéraient que la magie de ces Senseï s'était éteinte avec eux. Pourtant quelques enseignants dont Philippe Gouttard,[6][7] conscients du degré de mon investissement dans l'Aïkido, m'ont tout de même conseillé d'aller me former au Hombu Dojo, au moins pendant un temps, mais globalement, je ne peux pas dire que j'ai été "fortement" encouragé à y aller. Je suis arrivé à Tokyo avec des rêves plein la tête et un troisième Dan obtenu au bout de 14 années de pratique, dont la moitié effectuée dans des courants autres que l'Aïkikaï.

La machine Hombu Dojo

J'avais entendu tout et son contraire au sujet du Hombu Dojo, certains disaient que c'était un gros dojo impersonnel, une machine à faire de l'argent. On lit souvent ce genre de discours au sujet de certains dojos fameux. Si on entend par gros, un dojo où il y a beaucoup de passage et où beaucoup de gens ne restent pas longtemps, alors oui c'est vrai, le Hombu Dojo c'est un peu cela. Ceci dit, on peut se demander quel est le lieu le plus intéressant pour pratiquer ; celui où l'on ne sait jamais sur qui on va tomber, ou celui où l'on pratique avec les mêmes cinq ou six personnes toute l'année ? Pour ma part, je pense qu'à partir d'un certain niveau, la première option est la meilleure. Le fait que de nombreux pratiquants de tous les pays du monde viennent au Hombu Dojo force les pratiquants à tester leur technique et à s'adapter aux pratiques des autres. Il est difficile d'être complaisant dans ces conditions.

Si on pense au Hombu Dojo comme à un dojo où un visiteur aura l'impression d'être invisible, seul et responsable de ses actes, c'est aussi vrai. En tout cas, il faut un bon moment pour que les gens commencent à vous aborder et à venir d'eux même pour vous inviter à pratiquer. Personnellement, j'ai mis beaucoup de temps à développer des relations avec les autres pratiquants, mais c'est peut-être dû en partie à ma timidité. Pourtant, il y a tout de même tellement de passage que les pratiquants domestiques attendent souvent de voir si la personne va rester avant de créer des liens. Il y a également la différence culturelle et linguistique, et cela influence tout autant les rapports au niveau social que dans l'approche de l'enseignement.

Vu de l'extérieur, en particulier si on a une conception romantique de ce que l'on croit être un dojo traditionnel d'arts martiaux,[8] le Hombu Dojo est bien une machine un peu impersonnelle. Pourtant, et comme dans toute chose au Japon, il y a une face cachée et celui qui se donne la peine de regarder y trouvera un système éminemment Japonais, avec quelques aspects très conservateurs, mais essentiellement un système humain.[9]

Guillaume Erard au Hombu Dojo

Premiers pas de l'auteur au Hombu Dojo

Le Hombu Dojo, centre mondial ou dojo traditionnel ?

De par le fait que le Hombu Dojo serve de centre mondial, certains se demandent souvent si c'est vraiment un dojo, ou bien si ce n'est pas plutôt un lieu où l'on enchaîne les stages. Il ne faut pourtant pas oublier que pour beaucoup de résidents de Tokyo, le Hombu Dojo est vraiment "leur" dojo, avec ses règles, ses habitudes, ses sous-groupes, ses évènements, etc. Comme partout ailleurs, le niveau des pratiquants est hétérogène et il varie en fonction de l'investissement et du talent. En outre, le fondateur de l'Aïkido, Ueshiba Moriheï, ne faisait pas d'élitisme et il était connu pour ne jamais renvoyer personne. Sa politique de la porte ouverte était même, selon certains, la base de son système.[10][17] Fondamentalement à ce niveau, le Hombu Dojo est resté le même, il accueille tout le monde et chacun module sa pratique en fonction de ses propres besoins et de sa personnalité, quel que soit le niveau technique ou la fréquence d'entraînement. On est tous sur le même tatami, mais en fonction de ce que l'on cherche, on n'est pas obligé de pratiquer avec tout le monde de la même manière.

Je me souviens d'une fois où j'ai demandé à Miyamoto Shihan[11] pourquoi il avait invité une personne qui créait pas mal de problèmes au dojo. Il me répondit que le Hombu Dojo était comme une grande famille et que dans une famille, il fallait prendre en compte et aider même les gens que l'on n'aimait pas trop ou qui étaient trop différents. Cette réponse a eu une influence profonde sur moi et je trouve que quelqu'un qui est capable de dire cela, et surtout de le mettre en pratique, mérite vraiment le titre de shihan. C'est depuis ce jour que j'ai su que j'avais trouvé mon professeur au Hombu Dojo. Évidemment, d'autres professeurs là-bas ne raisonnent pas forcément en ces termes et certains ont même des comportements que je trouve injustes envers les gens qu'ils ne considèrent pas comme talentueux, mais c'est aussi ça la nature du Hombu Dojo, il offre une variété d'enseignements et de perspectives très différents.

L'auteur avec Miyamoto Tsuruzo Shihan (Vidéo par Guillaume Béchard)

La pédagogie à la Japonaise

On m'avait dit qu'au Hombu Dojo, on ne formait pas, ou mal, les débutants. Je dois effectivement concéder qu'être débutant au Hombu Dojo présente des difficultés toutes particulières, non pas que les professeurs ne sont pas qualifiés ou attentifs, mais l'enseignement se fait à la japonaise, via la répétition et l'émulation, avec peu d'instruction orale, et donc les progrès sont souvent lents au début et les gens habitués à des méthodes pédagogiques plus explicites comme en occident peuvent avoir du mal. Heureusement, le système de Sempaï-Kohaï [la prise en charge par un condisciple plus expérimenté][14] et le fait que les gens s'entraînent en moyenne plus souvent qu'ailleurs (les cinq cours par jour et l'absence de longues coupures en été et en hiver aident beaucoup), font que le système marche, mais pas pour tous, car il faut un peu d'autodiscipline et de concentration. Il faut surtout aussi arriver à créer et gérer les liens interpersonnels qui puissent permettre la mise en place de ce système Sempaï-Kohaï.

Certes, il existe des cours intensifs beaucoup plus structurés pour les débutants avec un numerus clausus, mais selon moi, même avec cela, les gens qui sont incapables de se plier aux règles plafonnent très vite, car personne ne s'occupe d'eux. Au Japon, on ne "corrige" pas forcément les gens qui ne respectent pas les règles, mais on les ostracise, ce qui est bien pire dans un pays où le tissu social est essentiel au fonctionnement des structures et des individus. Il y a un proverbe au Japon qui dit "Deru kugi wa utareru", ce qui signifie : un clou qui dépasse se fait marteler. Je me souviens en particulier d'un Canadien qui a réussi en très peu de temps à s'attirer le courroux d'à peu près tout le monde. Il était irrespectueux de ses aînés, corrigeait les gens qu'il trouvait inférieurs (surtout les femmes), se filmait lui-même sur le tatami à la fin des cours, utilisait son téléphone portable dans le dojo, etc. Cette personne est toujours là, mais il est à présent pratiquement isolé, personne ne le guide, et les professeurs ne le touchent pas malgré un certain potentiel physique. Par conséquent, il ne progresse pas. Je dois avouer avoir éprouvé beaucoup de frustration envers cet individu au début, mais au final, ce fut une leçon pour moi, car c'est à ce moment que j'ai compris comment le système japonais réglait les comportements asociaux ou anticonformistes, sans heurts, via les règles sociales tacites que tous les autres suivent. Rien ne dit cependant qu'une amélioration de son comportement ne puisse le faire réintégrer, mais il faudra du temps.

Toujours sur le plan de l'enseignement, j'ai été témoin de quelque chose d'assez intéressant. Un étranger vivant au Japon était candidat à un grade Dan. Durant son passage, il a été clairement irrespectueux et même dangereux envers ses uke. Il a été recalé et les professeurs lui ont clairement expliqué ce qui n'allait pas. L'année suivante, il s'est représenté au même grade et a fait essentiellement les mêmes erreurs. Logiquement, il a été encore une fois recalé. Les professeurs, Sugawara et Kanazawa Sensei, étaient très frustrés, mais leurs explications patientes ont été pour moi la preuve d'une tentative véritable et profonde d'enseigner, pas seulement la technique, mais aussi l'esprit de l'Aïkido. Les pratiquants du Hombu Dojo bénéficient d'un système où leur travail est sanctionné par les professeurs qui les instruisent chaque jour. On a donc un suivi du candidat, des professeurs qui parlent entre eux après les cours, et une construction en continu avec en fin de course, un examen formel. On enseigne donc bien au Hombu Dojo, il y a une réelle pédagogie, même si elle est peut-être plus ténue, globale, et moins portée sur la technique pure.

L'auteur avec Kanazawa Takeshi Shihan

Grade Aïkikaï ou grade du Hombu Dojo?

On doit faire la distinction entre grade Aïkkaï et grade Hombu Dojo. Je vois beaucoup de posters de stages de professeurs revendiquant un grade Aïkkaï. Pour les raisons que j'ai énoncées ci-dessus ainsi que plus bas, je trouve que cette bannière commune du grade Aïkkaï est une bonne chose, car elle nous unit dans une même famille. Par contre, inévitablement, à grade égal, la technique sera très différente, car chaque Shihan donne ses grades selon sa sensibilité. Ceci n'est d'ailleurs pas un problème, car un grade n'a fondamentalement de valeur que dans le lien qu'il officialise entre celui qui le délivre et celui qui le reçoit. Le grade met en lumière une filiation technique et une relation verticale, rien de plus, et ce n'est donc certainement pas un bon standard pour mesurer et comparer les gens entre eux. En cela, j'aimerais bien voir sur les posters de stages la mention "Xe Dan Aïkkaï délivré par Y Sensei" plutôt que "Xe Dan Aïkkaï", car en tant que stagiaire, je serais intéressé de savoir quel est le parcours et le lignage de l'intervenant.

Les conditions de passage de grade au Hombu Dojo sont les mêmes pour tous : il faut justifier d'un laps de temps adéquat depuis le grade précédent, et d'un nombre de jours de pratique suffisant (les journées où l'on est venu s'entraîner sont comptées via un système informatique). On peut donc en théorie se présenter pour un examen dès que l'on satisfait ces deux critères. Dans les faits, les choses sont un peu plus compliquées. Si on se trouve au sein d'un groupe d'élèves particuliers, le plus souvent autour d'un Sensei donné, il est de bon ton de savoir où en sont nos Sempai au niveau de leurs grades pour ne pas "sauter" les échelons. Il n'y a pas de règle écrite, mais il ne viendrait pas à l'idée à quelqu'un qui fait partie d'un groupe de passer un grade avant son ou ses Sempai. Ce n'est pas une question de valeur du grade, mais une question de dynamique de groupe. Il est également de bon ton de discuter avec ses condisciples, voire même son Sensei, de son intention de passer un grade, pas pour demander leur autorisation, mais pour recueillir leur opinion et leurs conseils. Je connais des gens qui ont attendu plusieurs années pour se présenter afin de ne pas bouleverser l'ordre hiérarchique. Cette notion est peut-être difficile à comprendre pour des pratiquants européens, mais encore une fois, au Japon, c'est la cohésion du groupe qui prime par rapport à l'avancement d'un individu. À l'inverse, j'ai vu des gens ignorer (volontairement ou pas) cet usage, en particulier des gens qui étaient au Hombu Dojo pour une courte durée. Ils ont pour la plupart obtenu leur grade et personne ne leur a rien dit, mais clairement, ils se sont de facto exclus du groupe, car ils ont quelque part "coupé" un lien moral et technique.

Tous les grades techniques au Hombu Dojo (du 5e Kyu au 4e Dan) sont passés devant un jury commun. Les jurys sont composés en général de deux Shihan et d'un Shidoin, tous ayant souvent des pratiques assez différentes. Pourtant, tout le monde s'accorde sur ce qu'un candidat doit présenter : le kihon. Ces bases sont définies par le Doshu Ueshiba Moriteru et elles servent de points de repère à partir desquels chacun est libre d'explorer. Durant les examens par contre, il faut montrer que l'on maîtrise bien ces bases. J'ai personnellement vu autant de gens recalés à cause d'un mauvais niveau technique que d'une technique trop "typée". J'ai même vu un professeur recaler un de ses propres élèves, car ceux-ci présentaient un travail trop proche de ce qu'il faisait lui-même. Ce même professeur ne recale pas ses élèves de cette manière lorsqu'il fait passer ses grades au sein de son dojo personnel. Les pratiques de chaque professeur au Hombu Dojo sont très diverses et pourtant, tout le monde arrive à se mettre d'accord lors de ces passages de grades en commun.

L'auteur avec Sugawara Shigeru Shihan

Le fait que l'élève choisisse de passer son grade soit au Hombu Dojo, soit au dojo personnel du professeur qu'il préfère a en soi-même une signification particulière.[9] Parlant de lignage, ce que je cherche en particulier au Hombu Dojo, ce n'est pas qu'un lien technique, mais bien moral avec les enseignants. Je travaillais il y a peu avec un partenaire au cours du Doshu et notre pratique, probablement pour des raisons de personnalités incompatibles, est devenue assez rude, jusqu'au point où je n'ai plus eu d'autre choix pour faire cesser ce jeu dangereux (pour nous tant que pour les gens qui nous entouraient) que d'effectuer un kaeshi-waza qui le sécha un peu sur le parquet. Entendant le fracas, un des uchi-deshi accouru et demanda ce qui se passait. Juste derrière lui, Doshu répondit : "Il ne se passe rien, retourne t'entraîner". Ma frustration retomba immédiatement, car je m'aperçus que même dans une situation de tension telle que celle-là, Doshu m'accordait le bénéfice du doute. Ce signe de confiance n'a duré qu'un court instant et il l'a probablement oublié depuis longtemps, mais pourtant, il vaut pour moi tous les grades et les titres du monde.

Le "style" Aïkikaï

Se mettre d'accord au niveau des passages de grades ne signifie pas pour autant uniformisation. Loin d'uniformiser la pratique ou d'installer un style ou une hégémonie, le système est pensé pour laisser les gens s'exprimer tout en définissant certains critères de base, piliers de l'Aïkido, et en définissant les secteurs de responsabilités. Quelques jours au Hombu Dojo suffiront à convaincre même un débutant qu'on n'y forme pas des clones du Doshu. Un simple après-midi passé au Budokan au cours des démonstrations du All Japan Aïkido permettra d'éliminer tout doute à ce sujet, pour le pire autant que pour le meilleur. En fait, les enseignants sont si différents entre eux qu'il peut être difficile de s'y retrouver si on n'a pas des bases solides et la capacité à trouver le fil rouge derrière l'expression externe des techniques. Le fondateur Ueshiba Moriheï et ses successeurs ont eu la grande intelligence de laisser les gens explorer et développer leurs pratiques individuelles sous un même toit. À une époque où on se déchire au nom de différences relativement minimes, je trouve que l'on aurait à apprendre du système japonais. J'ajouterais que c'est en fait probablement la rigidité de la hiérarchie qui permet à cette diversité de se développer sans contrainte. Chacun développe ce qu'il veut, mais tout le monde s'accorde sur qui fait quoi.

Edition 2013 du All Japan Aikido Demonstration au Budokan de Tokyo

En France, on est historiquement allergique à la hiérarchie, mais du coup, on hésite à s'inspirer d'un système japonais perçu comme fondamentalement totalitaire. De par leur histoire et le contexte socioculturel dans lequel ils se sont développés, les arts martiaux japonais sont clairement des systèmes non démocratiques, mais ça ne veut pas forcément dire qu'ils sont injustes. Les règles sont très claires, elles sont là pour une raison, et si on les accepte, il est tout à fait possible de s'épanouir et se développer au sein de ce système. En outre, comme je l'ai décrit plus haut, l'ordre hiérarchique, une fois établi est le plus souvent immuable, et donc on a toujours quelqu'un au-dessus de soi, quelqu'un qui a un devoir de nous guider, alors que nous avons le devoir d'écouter. Je trouve que le respect que l'on porte aux aînés au Japon, quelle que soit l'appréciation qu'on ait de la technique ou de la personnalité de chacun, est une fondation très saine pour développer un système qui se pérennise.

Il existe bien évidemment des problèmes, en particulier dans un système hiérarchique où des paramètres sont multiples et parfois conflictuels tels l'ancienneté, l'assiduité, le grade, le talent, etc., mais le Hombu Dojo, et par extension l'Aïkikaï, accueille en son sein des pratiques fort différentes et même si certains font des choix que d'autres ne partagent pas, chacun sait se retrouver sous une même bannière afin de travailler dans le même sens pour faire avancer la discipline.

Les grands maîtres de l'Aïkikaï sont morts, y a-t-il encore un intérêt à venir ?

Considérer que puisque les grands maîtres d'après-guerre sont morts le Hombu Dojo n'a plus d'intérêt est équivalent à considérer que la discipline dans son ensemble se meurt, et dans ce cas, c'est vrai quel que soit l'endroit où l'on se trouve. Malgré cela, je vois partout dans le monde des instructeurs à la technique remarquable et je ne dispose pas d'assez de temps pour apprendre de tous ceux que j'aimerais suivre. Le Hombu Dojo me plaît, car il rassemble des enseignants au calibre exceptionnel au même endroit, ce qui m'expose à une profondeur et une variété d'apprentissages que l'on ne trouve que dans très peu d'autres dojos. Ils ne sont pas forcément meilleurs, mais ils sont plusieurs, et surtout, j'ai également la possibilité de m'entraîner avec la plupart d'entre eux en tant qu'élève, ce qui est inestimable pour progresser.

Chaque enseignant démontre le fruit de la synthèse de ce qu'il a appris avec les grands comme Kisshomaru Doshu, Arikawa, Osawa, Yamaguchi, Tohei, etc. D'un point de vue plus personnel, plus qu'une décadence, je trouve que l'Aïkido se bonifie, il mûrit. Je juge cela en référence à l'Aïkido que je vois autour de moi, mais aussi par rapport à ma pratique du Daïto-ryu Aiki-jujutsu. L'Aïkido apporte pour moi des choses de très grande pertinence, même dans sa forme que certains qualifient de "moderne", si tant est qu'une telle chose existe. Toute une génération de professeurs très prometteurs est en train de se mettre en place et c'est une époque très stimulante pour être au Hombu Dojo. Évidemment je regrette de n'avoir jamais pu pratiquer du temps de Kisshomaru Doshu ou d'Osawa Senseï, mais je n'échangerais pas ma place pour autant.

Démonstration du second Doshu Ueshiba Kisshomaru à Paris

Certains se posent au Japon comme en France comme les héritiers ou les élèves préférés de tel ou tel maître, au-delà du fait que ces affirmations sont un peu infantiles et forcément mutuellement exclusives, l'histoire des arts martiaux japonais est faite d'élèves qui ont étudié avec des grands et qui sont partis dans des directions différentes. Ueshiba Morihei était-il meilleur ou moins bon que Takeda Sokaku ? La réponse sera différente selon la personne à qui vous la posez. Personnellement je pense que l'Aïkido progresse, grâce au travail fait au Japon, mais aussi grâce à celui des pratiquants à l'étranger. Je vois tout cela comme un bouillon de culture, une sorte de plate-forme de libre échange d'idées. L'important est que les idées se rencontrent.

Que peut-on espérer retirer de quelques semaines passées au Hombu dojo ?

Je lis souvent les écrits de gens qui sont venus au Hombu Dojo pendant quelques jours, semaines, mois ou années et qui disent ne pas avoir appris grand-chose, ou bien que cela n'a pas révolutionné leur pratique. Honnêtement, je pense qu'il serait très étonnant que cela se passe autrement. On parle bien d'Aïkido ici, et que ce soit au Japon ou ailleurs, seule une étude profonde, dans la durée, peut changer une pratique. Pire, le fait même qu'une telle expérience puisse rapidement convaincre quelqu'un de changer est selon moi peu désirable. Sinon, on est dans l'impressionnabilité immédiate, le spectaculaire, ou la démonstration. Donc ces raisons qui pourraient conduire à une volonté immédiate de redirection fondamentale de la pratique, même si elles étaient effectives, ne seraient par leur nature pas les bonnes.

L'élève qui arrive dans un dojo ne sait pas ce qu'il vient chercher (ce que le dojo/professeur a à offrir), il ne peut donc pas prendre une décision informée de ce qu'il peut ou pas apprendre, car s'il est élève, cela veut dire que son niveau ne lui permet pas de juger techniquement un Senseï. Donc il peut juste décider de rester ou pas, pour des raisons plus émotives que techniques. Ce qui est peut-être particulier au Japon est qu'il faut souvent beaucoup de temps (des années) pour que les Sempaï et les Senseï commencent à "donner" quoi que ce soit. Étant donné les relations presque uniquement verticales et éminemment proximales au Japon entre les individus de chaque strate d'expérience,[12][13] il est sûr que dans ces conditions, les progrès au début, et par conséquent les changements, sont lents.

Intégration dans un système à plusieurs vitesses

Tout le monde sait qu'il y a aussi au Japon des systèmes qui courent en parallèle. D'abord pour les membres du dojo [uchi : dedans] par rapport aux visiteurs [soto: dehors]. Mais même au "dedans", il existe des sous-systèmes et tout le monde n'est pas exposé aux mêmes choses. On donne le plus aux uchi-deshi, puis au soto-deshi, puis aux élèves réguliers du dojo, puis aux gens un peu plus dilettante, etc.

Il y a aussi le talent et la personnalité qui entrent en compte, ainsi que la volonté (ou pas) d'un ou plusieurs Sempaï de nous guider (relation verticale proximale). On sous-estime beaucoup l'importance des Sempai dans l'enseignement.[14] Moi-même, je rejetais par principe ce système avant de partir au Japon,[15] mais aujourd'hui, mon opinion sur ce sujet a énormément changé. Le fait que cette transmission Sempai-Kohai ou Sensei-Deshi se mette en place dépend du niveau de celui qui vient (un peu), des éventuelles recommandations (un peu), de la longueur du séjour (beaucoup), et des liens affectifs entre les différents membres/Senseï de chaque sous-groupe (énormément). Osawa Sensei dit qu'on ne peut vraiment apprendre d'un professeur que si on passe régulièrement entre ses mains.[16] En cela, c'est vraiment ainsi qu'il choisit ses élèves. Outre le fait que je m'intéresse à l'Aïkido de ce Sensei, c'est le fait qu'il me sollicite comme uke à tous les cours qui fait que je n'en rate aucun, c'est un accord tacite entre nous : il souhaite me donner quelque chose de plus et je m'efforce de comprendre ce qu'il fait. À l'inverse, au bout de quatre ans, il y a encore quelques professeurs qui ne me sollicitent que rarement, c'est sûrement de ma faute, peut-être est-ce volontaire, peut-être pas, mais c'est un signe que la relation ne s'est pas établie.

L'auteur avec Kobayashi Yukimitsu Shihan

J'ai vu des gens arriver avec des lettres de recommandation venant de très grands maîtres. D'autres, comme moi, sont venus sans rien d'autre que notre volonté de faire. Globalement, je ne vois pas beaucoup de différence entre les deux sur le long terme, car les relations au Japon se créent sur la durée, de personne à personne. Avant de venir au Japon, j'avais évidemment demandé à mes professeurs de me recommander auprès de certains professeurs de l'Aïkikaï, mais à ma grande déception, ceux-ci m'ont conseillé de venir par moi-même, sans étiquette, de me faire ma place moi-même, et surtout de garder une certaine liberté. J'avoue avoir été assez déçu de leur réponse négative. Peut-être estimaient-ils que je n'étais pas un élève assez "proche" d'eux pour qu'ils me donnent une telle lettre d'introduction, mais j'aime en fait à croire qu'ils ont vu en moi quelqu'un de trop indépendant pour que je me place immédiatement sous la coupe d'un Sensei en arrivant. A posteriori, je m'aperçois qu'ils m'ont rendu un grand service en me refusant ces lettres, car ce faisant, je ne traine pas une étiquette ou la réputation d'un professeur. J'ai pu être considéré comme un élève du Hombu Dojo plutôt qu'un "élève de X Sensei en séjour au Japon". Pour cela, je les remercie sincèrement de leur clairvoyance.

Je me suis intégré au Hombu Dojo, mais par étapes. Petit à petit, on est venu m'inviter pour pratiquer, puis on m'a proposé d'aller en stage, ou de venir dîner avec un Sensei après le cours. Un jour, je travaillais avec Irie Sensei comme partenaire et à côté de nous, un pratiquant venu pour le congrès international avait tendance à prendre trop d'espace. Ma frustration atteint son comble lorsqu'il me marcha sur le pied sans s'excuser. J'allais le corriger vertement lorsque Irie Sensei me dit, "c'est un visiteur, on n'y peut rien". C'est ce jour que j'ai réalisé que pour lui, je ne faisais plus partie de l'"extérieur", mais que j'étais quelque part, dans l'une des strates intérieures. A posteriori, en repensant à mes rapports qui furent parfois un peu tendus avec ce Sensei, je me suis rendu compte que les fois où il m'a réprimandé, j'aurais du éprouver de la gratitude qu'il prenne la peine de me corriger plutôt que de m'offusquer du fait qu'il me reprenne un peu sèchement.

À l'inverse, l'intégration a des limites, et même au sein de l'"intérieur" il y a des strates qui restent inaccessibles, celle des uchi-deshi en particulier. Cela se voit souvent au niveau de l'ordre dans lequel les Sensei appellent les uke pendant un cours. Beaucoup de professeurs appellent les élèves par strate, puis par ordre hiérarchique, les uchi-deshi d'abord par ordre d'ancienneté, puis les soto-deshi, ici aussi par ordre d'ancienneté, mais aussi d'affinité. Une fois, j'étais au cours de Kanazawa Sensei et il entreprit de solliciter les uchi-deshi dans l'ordre que j'ai expliqué précédemment. À un moment donné, il m'appela comme il le fait d'habitude, mais cette fois, à ma surprise, il le fit avant d'appeler le dernier uchi-deshi. Il s'aperçut de son erreur et me renvoya m'assoir en disant : "oh, désolé, il reste des gens du dedans [uchi no hito]" et il fit venir cet uchi-deshi. Il me rappela pour la technique suivante. Ceci illustre le fait que l'organigramme est très clair, et qu'il se fait à plusieurs niveaux qui courent en parallèle et selon plusieurs critères. Même si le deshi en question est arrivé au Hombu Dojo après moi, il doit être appelé avant puisque qu'il fait partie d'un cercle intérieur par rapport a moi, mais par contre, lorsque l'on travaille ensemble, c'est à moi d'initier la technique puisque je suis son sempai.

L'Aïkido Aïkikaï a-t-il perdu sa profondeur ?

Personnellement, au bout de quatre ans de pratique quotidienne au Hombu Dojo, je commence à peine à entrevoir la richesse et la profondeur de ce qui peut y être appris. J'aurais peut-être pu apprendre cela dès le début si j'avais été plus talentueux ou attentif, mais je ne m'en rends compte que maintenant. Je comprends donc tout à fait que des gens quittent le Hombu Dojo au bout de plusieurs mois ou même plusieurs années avec un sentiment de superficialité. Je sais qu'en disant cela, je prête mon flanc à la critique puisque je pratique aussi le Daïto-ryu. Ce qui est mal compris est que je ne cherche pas à combler un manque de l'Aïkido via le Daïto-ryu. En fait, je prends le répertoire du Daïto-ryu comme une façon d'aborder les principes qui sont dans l'Aïkido d'une façon plus décomposée (2 884 techniques au lieu de 20). Je ne considère pas qu'il manque quoi que ce soit à l'Aïkido qu'on me démontre au Hombu Dojo, je pense par contre que je ne suis pas forcément assez talentueux pour aborder un niveau si élevé sans l'appui d'un curriculum plus large. La relative simplicité de l'Aïkido le rend difficile à comprendre. Ceci dit, au contraire de moi, certains y arrivent très bien sans passer par le Daïto-ryu. Mon besoin de Daïto-ryu est donc plus un constat de mes limites en Aïkido que des limites de l'Aïkido, et plus précisément, de l'Aïkido de l'Aïkikaï.

L'importance de connaître le Japon pour connaître l'Aïkido

En parlant de système japonais, même si j'ai dit plus tôt que l'Aïkido avait été pensé par le fondateur pour être diffusé hors du Japon dans des contextes culturels très différents de celui d'origine, je suis fermement convaincu que l'étude de la culture et de la langue japonaise est essentielle si on veut accéder aux niveaux supérieurs de la discipline. Je ne serais pas là où je suis si je ne pensais pas cela. Par exemple, il est intéressant de connaitre les kanji utilisés pour nommer les techniques. Kote gaeshi s'écrit "小手返", ce qui signifie "retourner le gant". Retourner n'a pas le sens tordre, mais rendre, et le gant ne désigne pas uniquement le poignet, mais tout l'avant-bras. Ce genre de considérations change beaucoup de choses lorsque l'on reçoit les instructions des Sensei. Dans le cas ici présent, selon le type de Kote gaeshi que l'on effectue, il faudra être très précis sur la terminologie, sinon on risque d'effectuer les différentes formes hors contexte, sans savoir les différencier correctement, c'est à dire en les présentant uniquement comme des variations, alors que ces formes sont en fait régies par des principes différents. Ceci étant dit, la japanophilie est peut-être moins importante que ce qu'elle représente, c'est-à-dire une certaine érudition et une volonté d'explorer toutes les facettes d'un art, de son histoire, et de la culture qui l'a vu naître (cette volonté d'érudition est une autre justification de mon apprentissage du Daïto-ryu).

Venir au Japon n'est pas une garantie d'accès à la connaissance et à la progression, mais je pense qu'il est nécessaire, par honnêteté intellectuelle, de regarder l'investissement personnel qu'il y a derrière et le contexte de la pratique. Il faut être un peu fou pour tout quitter et s'installer dans un pays à l'autre bout du globe juste à cause d'un loisir. C'est cette folie qui différencie à mes yeux le passionné d'Aïkido de celui qui vit l'Aïkido (et pas forcément de l'Aïkido). Il me parait évident que quelqu'un qui quitte tout pour s'installer au Japon et pratique quotidiennement en tant qu'élève dans un endroit comme le Hombu Dojo, à Iwama, ou au Yoshinkan progressera beaucoup plus que quelqu'un qui pratique ou enseigne trois fois par semaine avec les mêmes dix à vingt personnes. Il faut comparer ce qui est comparable. Il n'y a aucun jugement de valeur là-dedans : le courant ou le style importe peu, il s'agit juste d'une différence claire d'investissement et un contexte favorable à la pratique (tout comme peuvent l'être le Shumeikan ou Vincennes).

L'auteur avec Miyamoto Tsuruzo Shihan

Parlons de jugement de valeur justement. Vous avez sûrement comme moi entendu pas mal de choses au sujet du Hombu Dojo, venant de tierces personnes. Globalement aucun avis n'est plus valable qu'un autre, le mien inclu, et l'expérience dans un art comme l'Aïkido est tellement personnelle et dépendante de tant de facteurs humains qu'on ne peut prévoir ce qui va se passer. Je suis dans cet article très positif au sujet du Hombu Dojo, et certains pourraient écrire le même article, mais de façon totalement opposée. Rappelez-vous cependant que quiconque qui revient de n'importe quel dojo en disant "ils sont nuls" en révèle plus sur lui-même que sur l'endroit dont il revient. Ne vous méprenez pas, on ne vous parlera peut-être pas au Hombu Dojo, mais vous serez observé. Selon votre attitude ou votre niveau, on ira, ou pas, vous inviter pour pratiquer. Comme je le disais précédemment, le Hombu Dojo a une palette très étendue de niveaux et de pratiques et au final, on tombe très souvent sur les partenaires que l'on mérite.

Un bénéfice mutuel

Au même titre que le Hombu Dojo perdrait une grande partie de son intérêt si on se retrouvait juste entre Tokyoïtes (comme c'est arrivé après le séisme du 11 mars 2011), je pense que pratiquer l'Aïkido sans aller à l'aventure à son berceau serait dommage, surtout de nos jours avec le faible coût des transports. Morihei Ueshiba était un génie créateur, son art n'a à aucune période de sa vie été fixé, et il n'a jamais cherché à brider la créativité de ses élèves. Tout comme dans mon métier de biologiste, je suis absolument convaincu que pour que l'Aïkido progresse et reste pertinent dans un monde changeant, il lui faut diversité et échange. Un des challenges les plus importants auquel on fait face en avançant en Aïkido n'est pas seulement technique, mais aussi moral : peut-on arriver à pratiquer, communiquer, évoluer, bouger, avec des gens différents qui ne partagent pas nos codes, sans les juger ? Tant que le Hombu Dojo, et plus largement l'ombrelle Aïkikaï permettront cela aux pratiquants, tant que le système sera en place pour permettre les échanges en encourageant la diversité, je resterai un enthousiaste de ce système, en dépit de ses petits travers et ses dysfonctionnements. Si vous souhaitez en apprendre plus sur le Hombu Dojo et son fonctionnement, lisez le guide que j'ai écrit à l'attention des Aikidoka en voyage à Tokyo.


Références

  1. Guillaume Erard - Biographie d'André Nocquet
  2. Guillaume Erard - Biographie de Christian Tissier Shihan
  3. Guillaume Erard - Interview d'André Nocquet
  4. Guillaume Erard - Interview d'Alan Ruddock
  5. Guillaume Erard - Interview d'Henry Kono
  6. Guillaume Erard - Paysages urbains nocturnes de Tokyo
  7. Guillaume Erard - Interview de Philippe Gouttard
  8. Dave Lowry - In the Dojo: A Guide to the Rituals and Etiquette of the Japanese Martial Arts (Weatherhill)
  9. Guillaume Erard - Interview d'Olivier Gaurin
  10. Guillaume Erard - Interview d'Ellis Amdur
  11. Emmanuel Marès - Interview de Miyamoto Tsuruzo
  12. Nakane Chie - Japanese Society University of California Press
  13. Roger Davies - The Japanese Mind Tuttle Publishing
  14. Katherine Heins - Explication de la relation entre Sempai et Kohai
  15. Aurore Mammet - Interview de Guillaume Erard Blog du Gonojukan
  16. David Halprin - Interview d'Osawa Hayato Shihan
  17. Stanley Pranin - Interview with Moriteru Ueshiba Aikido Journal
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À-Propos

Site officiel de Guillaume Erard, auteur, instructeur et vidéaste résident permanent au Japon - 5e Dan Aïkido du Hombu Dojo de l'Aïkikai de Tokyo / 5e Dan Kyoshi (professeur) de Daïto-ryu Aïki-jujutsu du Shikoku Hombu Dojo.